jeudi, 12 juillet 2007
«Enquête sur l’attentat contre Soro - Comment l’Elysée veut brouiller les pistes»
Le Matin d'Abidjan — mercredi 11 juillet 2007 — http://news.abidjan.net/article/?n=256620
par Guillaume N'Guettia
« Rien n'arrête l'Elysée qui veut blanchir la Licorne, fortement compromises dans l'attentat manqué contre le Premier ministre. Ses réseaux médiatiques se succèdent donc, pour noyer le poisson et mettre en cause le Palais d'Abidjan.
Ils remettent le couvert. Les traditionnels canaux médiatiques au service de la France officielle sont en branle. Dès les premiers moments de l'attentat manqué contre le Premier ministre, c'est l'AFP qui ''découvre'' les présumés auteurs de l'attaque. Les premières dépêches sont formelles, il s'agit d'assaillants issus de la rébellion, mécontents du nouveau cadre institutionnel issu du dialogue direct. L'opinion aura noté. Le 29 juin, l'agence de presse reste silencieuse sur la dénonciation à chaud de Konaté Sidiki et Issiaka Ouattara ''Wattao'' qui ont publiquement accusé la Licorne et l'ONUCI. Depuis, la thèse est invariablement reprise par les autres réseaux. A la suite de ''la radio du monde'', Jeune Afrique entre en scène, avec une autre variante. Le camp présidentiel est mis en cause. Dans sa dernière parution, l'hebdomadaire panafricain tente à son tour de brouiller les pistes pouvant conduire aux militaires français et onusiens. Celui qui monte au créneau est Christophe Boisbouvier, le chef de file des anti Gbagbo sur les ondes de RFI, et accessoirement collaborateur à Jeune Afrique. Dressant un tableau qui se veut des plus précis de l'attentat, où la présence de la Licorne et l'ONUCI au sein de l'aéroport est néanmoins occultée, le papier conduit à trois pistes. La première, celle ébauchée les premiers jours, mène à des éléments des forces nouvelles remontés contre Soro. " Comme le coup a eu lieu dans le fief des FN, la première hypothèse est, bien entendu, celle du complot ourdi au sein même de l'ex rébellion. Chacun sait qu'après l'accord de Ouagadougou et, surtout au lendemain de l'accession de Guillaume Soro à la primature, des anciens rebelles se sont demandé si leur chef n'allait pas les trahir ", reprend J.A pour faire chorus avec ses confrères. Pour justifier cette hypothèse, il se sert d'un document édité par ''International crisis group'' deux jours avant le bombardement du Fokker 100. L'ONG estime justement que " les choix de Soro ne sont partagés avec le même enthousiasme par tous les responsables des FN." L'assertion de Jeune Afrique est alimentée par les hésitations et atermoiements de Soro, au lendemain de l'attentat. Jouant des coudes pour ne pas fragiliser son mouvement, le Premier ministre prend le contre-pied de ses collaborateurs. Il ''blanchit'' les chefs de guerre Koné Zakaria et Chérif Ousmane, visiblement en rupture de ban, ainsi que les forces militaires internationales vertement mises en cause. Les media porte-voix de la Françafrique se servent donc de ces approches discordantes pour mettre hors d'atteinte, la France et l'ONU. Dans la foulée, une seconde idée est émise. Ibrahim Coulibaly ''IB'' dont l'ombre n'arrête pas de planer sur Bouaké, est mis en cause. L'hebdomadaire panafricain monte en épingle sa farouche opposition à Soro, pour le désigner probable coupable. Mais très vite, le sergent qui vit en exil à Cotonou au Bénin est déclaré incapable d'une action de telle envergure, malgré la confiance dont il continue de bénéficier de la part d'une frange des combattants des zones assiégées.
Détourner les regards sur la Licorne
Pour mieux disculper celui vers qui lorgnent pas mal d'Ivoiriens, l'hebdo lui donne les moyens de sa défense. IB est interrogé et comme l'on peut s'y attendre, dément : " Je n'ai rien à voir avec cet attentat (…) J'attends qu'on me cite officiellement et si jamais on m'accuse, ceux qui m'attaquent vont m'entendre. " S'il n'a pas convaincu, Boisbouvier vole à son secours.N"Depuis quelques mois, IB se sait surveillé de près. Aurait-il commis une telle imprudence ? " s'interroge l'auteur du papier, comme pour mettre fin aux soupçons qui pèsent sur le sergent déserteur. Le camp présidentiel n'a pas droit à cet honneur. Gbagbo et ses proches que vise en réalité Jeune Afrique, n'ont droit qu'à des accusations, sans possibilité de contredire les ''enquêteurs'' parisiens. C'est la troisième phase de ce qui s'apparente à une opération ''disculper la Licorne et les casques bleus''. " Si l'on suit le raisonnement de Guillaume Soro, c'est-à-dire la piste du coup venu d'ailleurs, on ne peut écarter non plus l'hypothèse du complot ourdi par le camp Gbagbo. En Côte d'Ivoire, certains observateurs n'hésitent pas à soupçonner le chef de l'Etat ivoirien Laurent Gbagbo d'être lui-même compromis dans l'affaire ", accuse J.A, mettant les pieds dans le plat. Si l'hebdo panafricain concède qu'il " est difficile d'y croire " à cause du dialogue direct initié par Gbagbo, ses proches sont cloués au pilori. " En revanche certains membres de l'entourage présidentiel n'auraient pas été chagrinés si Soro avait disparu. Sa nomination à la tête du gouvernement a diminué la marge de manœuvre du FPI et la part de gâteau réservée à ses barons ", manipule cette autre caisse de résonance de la nébuleuse françafricaine. Jeune Afrique fait donc dans l'intox, pour ''mouiller'' les partisans de Gbagbo. Avec au bout toujours la même ambition : écarter l'armée française du champ de vision d'éventuels véritables enquêteurs. Là encore, c'est un refrain qui remonte au début de la crise armée qui est entonné. Kadet Bertin, le conseiller militaire du palais d'Abidjan, " censé avoir la haute main sur les commandos " est épinglé par les limiers de l'hebdomadaire panafricain. " Tout est possible. Même une infiltration en zone nord d'un commando du Sud avec la complicité de quelques éléments des FN " notent les scribes de l'Elysée qui ne s'arrêtent pas là. Reprenant un air déjà entendu dans la sphère des houphouëtistes, Boisbouvier se demande, pour crédibiliser ses charges contre la présidence de la République : "Pourquoi la présidence s'est-elle empressée de faire rentrer l'avion cible à Abidjan, le soir même du 29 juin ? " Réponse de ''JA'' déguisée en interrogation : " N'était-ce pas pour effacer les traces de l'attentat ? " Bien entendu, c'est le black out sur les explications du chef de l'Etat sur le sujet. Recevant l'équipage du Fokker 100 mardi 4 juin soit cinq jours après l'attentat, Gbagbo qui a félicité les pilotes a confié que le retour en catastrophe de l'appareil était mû par la crainte d'autres pilonnages à la roquette en pleine nuit. Mais cela, Jeune Afrique et Boisbouvier n'en ont cure. Il faut un coupable pour détourner les regards sur les militaires français. Et cela vaut bien les coutumiers assauts contre le numéro 1 ivoirien et ses partisans. »
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vendredi, 06 juillet 2007
Darfour — «pédagogie médiatique», ou : comment être sûr de ne rien comprendre…
Lu sur Afrikara, un article utile : il permet de démêler quelques nœuds médiatiques habituels concernant le conflit du Darfour. Je relèverai cinq précautions de cet article, que j’ai marquées (*), précautions indispensables pour sortir un peu du flou sémantique et de l'embrouillamini de la «pédagogie médiatique» qui prévaut habituellement concernant le Darfour.
L’article d’Afrikara — 03/10/2006 —
http://www.afrikara.com/index.php?page=contenu&art=1416&PHPSESSID=8bdb22622f01bb890ec793b825a2209a:
« Darfour, génocide en direct : Périssent les Faibles, surtout s’ils sont Africains !
Le conflit qui a éclaté au Darfour en mai 2003 a déjà eu les pires qualificatifs possibles, de génocide pour Colin Powell, à crime contre l’humanité pour le président français Jaques Chirac, il n’a pas arrêté depuis quelques années de susciter émotions, promesses généreuses, cris d’alarme. En septembre 2006, plus de 30 000 personnes manifestaient à New York contre cette tragédie humaine, ses plus de 200 000 morts et 2,5 millions de déplacés, ses milliers de femmes violées, familles torturées, razziées, villages brûlés, exécutions de masses. Dany Glover ou Georges Clooney, personnalités réputée du cinéma mondiales, n’ayant pas hésité à s’afficher pour la cause du Darfour.
Une horreur indicible qui fait pourtant son chemin malgré vents et marées. Peut-être que si il y avait quelque part une véritable volonté d’arrêter ces déplacements de populations et massacres consécutifs aux combats entre milices dites «arabes» (*) Djandjawids, soutenues par le gouvernement et «ethnies» dites «africaines» (*), cela se serait su.
Ce conflit est très emblématique des intérêts des puissants et de la situation des faibles dans la géopolitique mondiale d’aujourd’hui. L’ONU -est-ce une surprise ?- est paralysée par l’implication de deux membres du Conseil de sécurité aux côtés des autorités soudanaises : la Russie fournisseur d’armes d’une répression sans nom d’un gouvernement sur une de ses populations -de l’Ouest- et la chine qui exploite le pétrole du pays.
A cette neutralisation de l’ONU, finalement bien faiblement utile à la paix dans le monde, lorsque de surcroît ses « grands pays » ne sont pas d’accord…, précède la vieille tradition de razzias esclavagistes menées par les populations arabes sur les Noirs (*), dans un climat politique dominé par une dictature militaire islamique.
Un conflit complexe donc. Politique, les Africains -non musulmans ou pas assez (*)- ayant toujours été muselés et sujets de brimades et servitudes, s’étant mis en rébellion contre le régime islamique au pouvoir ; économique avec des oppositions pour le partage de la terre entre paysans sédentaires et nomades; et religieux-culturel -«animistes» contre musulmans (*).
Au milieu de cette catastrophe humanitaire où les conditions d’existence des déplacés s’aggravent de jour en jour, en 2004, mai 2004 selon le journal allemand Zeit, la Syrie avait profité du cheptel humain africain, pour tester sur les populations africaines du Darfour, des armes biologiques. En accord de «coopération» avec le gouvernement soudanais ! Une information passée inaperçues en son temps.
Les tribulations de l’Union africaine, de l’UE et toutes les interpellations, appels et mobilisations ne parviennent aucunement à infléchir la violence du régime central du Soudan. Il faut reconnaître que le Darfour représente un bon «produit» dans l’imagerie occidentale inconsciente du monde. Des Noirs jamais moins indignes dans les images internationales retrouvent toute leur place dans les médias occidentaux. Une place utile à montrer un négatif, utile à démontrer indirectement les zones «civilisées» où il vaudrait mieux avoir le privilège de vivre, tout en se rendant sensible aux clichés dégradants et avilissants de peuples entiers pourtant visibles sur d’autres aspects.
Prenant la place jouée naguère par l’Ethiopie et les famines, le Darfour rassure aussi ceux qui n’imaginent l’Afrique que malade, en guerre, mourante, à aider, modalité subtile de contrôle des Etats modernes et riches, tout en inculquant aux Africains la haine de soi, l’indifférence aux autres, aux valeurs, à soi.
Le Darfour rempli ainsi une mission de reproduction des imaginaires de la modernité, de la civilisation et des barbaries, avec l’aide de tous ! »
Les cinq précautions commentées :
— 1) «milices dites "arabes"» : «dites "arabes"» (avec les guillemets), précision indispensable ;
— 2) «"ethnies" dites "africaines"» : de même que les guillemets à «arabes», les guillemets à «ethnies» et à «africaines» sont fort utiles dans la mesure où tous, localement, sont «africains», et où il n’est pas indispensable de recourir à la notion d’«ethnie» ;
— 3) «les Africains - non musulmans ou pas assez -» : la précision «pas assez» musulmans, corrigeant «non musulmans» donne cette indication fort précieuse : le véritable problème local n’est pas «ethnique», mais relève de l’intégrisme du pouvoir (pouvoir soutenu en son temps, au-delà de la Chine et de la Russie, aussi par la France et les USA ! — ceci expliquant largement cela). Le régime intégriste a ainsi tout loisir de ne pas tolérer, et les chrétiens, et les musulmans… «pas assez» musulmans (que nos médias appellent les «Noirs» pour les distinguer des «Arabes», lesquels «Arabes» sont éventuellement aussi africains, voire «noirs» que les autres ! — mais lesdits «Arabes» sont adeptes d’un islam — arabe — qu’ils considèrent plus pur…
— 4) «"animistes" contre musulmans» : on comprend à la lecture de ce qui précède que les guillemets à «animistes» sont indispensables.
À cela s’ajoute
— 5) «la vieille tradition de razzias esclavagistes menées par les populations arabes sur les Noirs», «tradition»-prétexte sur laquelle s’appuient les intégristes au pouvoir — cette «vieille tradition» servait en effet d’alibi pour des razzias s’autorisant d’une… mission civilisatrice — «les bienfaits de la colonisation» — (musulmane en l’espèce) : réduire des populations en esclavage pour leur bien !
Où les puissances onusiennes, au-delà de leurs intérêts, manifestent un certain… embarras ; tandis que nos médias, sous prétexte de simplifier les choses pour le public (mais ont-ils bien saisi eux-mêmes), ethnicisent un problème autre, et du coup, embrouillent tout.
Pendant ce temps, les musulmans «pas assez» intégristes, non seulement subissent violences et massacres, mais servent en outre d’alibi à la bonne conscience du citoyen euro-américain lambda, qui peut s’en prendre aux «Arabes», finalement bien pires qu’on l’est chez nous : c’est ainsi que nos pouvoirs, se joignant à ce concert larmoyant mais inoffensif — d’un citoyen télévisuel qui ne comprend rien (et pour cause) —, peuvent continuer à s’indigner vertueusement contre les Chinois, les Russes… et accessoirement les Africains, décidément incurables !…
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lundi, 18 juin 2007
«RDR / Zemogo claque officiellement la porte — ADO perd la bataille contre la dissidence»
Le Matin d'Abidjan — lundi 18 juin 2007 —
http://www.lematindabidjan.com/visual_article.php?num_actualite=7562:
par Bidi Ignace :
« Le germe de la division a eu raison du RDR. Malgré maintes négociations et coups d'éclat, la dissidence s'est définitivement désolidarisée.
Fini les négociations entre la dissidence conduite par Zémogo Fofana et la direction du Rassemblement des républicains (RDR). Le ''cas Zémogo'' qui n'existerait pas au sein du parti est devenu grave. La fracture est confirmée depuis hier, dans l'après-midi. En effet, Zémogo Fofana a claqué la porte et annoncé officiellement son départ. Il s'est retranché au siège de la Cafca-Ci, une structure de négoce en café-cacao, sise au II Plateaux Vallon, à quelque 500 mètres du cabinet de Alassane Dramane Ouattara, pour livrer sa déclaration de rupture. " Je viens de terminer un processus et j'ai pris la décision de quitter le RDR ", a-t-il confié. Son départ est l'expression de l'échec des nombreuses négociations, " maintes concertations ", avec la direction. La dernière négociation date du mercredi 13 juin dernier, au terme de laquelle les partisans d'ADO ne sont pas parvenus à retenir leur camarade. La dissidence est donc consommée même si le partant la veut une " séparation fraternelle ". Tant il considère comme un moyen pour lui de recharger ses batteries. Mais au profit de qui ? L'on saura plus tard la réponse à cette question. Pour la simple raison que lui-même évite encore de préciser son point de chute. Par contre, il s'explique aisément sur le motif du divorce, dû à " une seule raison : la rupture de la confiance entre (lui) et la direction du parti ". C'est pourquoi, à l'en croire, il n'a eu besoin d'aucune personne interne à cette direction pour se décider. " Je ne pars avec personne. J'ai décidé souverainement et personnellement de partir ", jure-t-il. Toutefois, le nouvel ''électron libre'' reste attaché aux idéaux de son ancien parti dont il entend poursuivre le combat. Zémogo Fofana " demeure dans les idéaux, l'élan du combat et le sens de la lutte du RDR ". Mieux, il ambitionne de rester sur la ligne de front. Alors qu'il donnait dos hier à Alassane Dramane Ouattara et ses partisans, Zémogo Fofana a exprimé une " pensée très profonde " pour les militants du RDR. Le faisant, il rend hommage aux victimes et autres anonymes qui ont perdu la vie pour le parti.
Un vrai camouflet pour ADO
Le président du RDR se trouve en ce moment hors du pays. Avant son départ, il a eu des échanges avec Zémogo. Ces échanges se sont déroulés nuitamment à la Rue Lepic, siège du parti. Le seul fait qui pouvait inquiéter le président du RDR au sortir de cette rencontre-là, ce sont bien les éclats de voix autour du compromis obtenu avec Zémogo. Rien ne devait en effet filtrer des entretiens. Mais les partisans d'ADO, tenant une conférence de presse ce jour-là, ont tenté de faire croire que Zémogo Fofana avait abdiqué. Il aurait même fait allégeance au mentor. Une réplique des pro-Zémogo s'en est suivie, qui a rétabli " la vérité ". Malgré la dissonance attestant que tout était bel et bien fini, ADO a continué à nier l'évidence, estimant que Zémogo n'est qu'un " épiphénomène ". Hier, Zémogo a donc rendu le tablier, avec un air de défiance. C'est en face des bureaux de Ouattara qu'il s'est prononcé, infligeant un camouflet au mentor. Car, du côte à côte, ce dernier a choisi, pour quitter ''la case'', le face-à-face. A preuve, c'est en face des bureaux d'ADO que Zémogo a tenu son premier point de presse. »
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