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vendredi, 06 juillet 2007

Darfour — «pédagogie médiatique», ou : comment être sûr de ne rien comprendre…



Lu sur Afrikara, un article utile : il permet de démêler quelques nœuds médiatiques habituels concernant le conflit du Darfour. Je relèverai cinq précautions de cet article, que j’ai marquées (*), précautions indispensables pour sortir un peu du flou sémantique et de l'embrouillamini de la
«pédagogie médiatique» qui prévaut habituellement concernant le Darfour.



L’article d’Afrikara
— 03/10/2006
http://www.afrikara.com/index.php?page=contenu&art=1416&PHPSESSID=8bdb22622f01bb890ec793b825a2209a:


« Darfour, génocide en direct : Périssent les Faibles, surtout s’ils sont Africains !

Le conflit qui a éclaté au Darfour en mai 2003 a déjà eu les pires qualificatifs possibles, de génocide pour Colin Powell, à crime contre l’humanité pour le président français Jaques Chirac, il n’a pas arrêté depuis quelques années de susciter émotions, promesses généreuses, cris d’alarme. En septembre 2006, plus de 30 000 personnes manifestaient à New York contre cette tragédie humaine, ses plus de 200 000 morts et 2,5 millions de déplacés, ses milliers de femmes violées, familles torturées, razziées, villages brûlés, exécutions de masses. Dany Glover ou Georges Clooney, personnalités réputée du cinéma mondiales, n’ayant pas hésité à s’afficher pour la cause du Darfour.

Une horreur indicible qui fait pourtant son chemin malgré vents et marées. Peut-être que si il y avait quelque part une véritable volonté d’arrêter ces déplacements de populations et massacres consécutifs aux combats entre milices dites «arabes» (*) Djandjawids, soutenues par le gouvernement et «ethnies» dites «africaines» (*), cela se serait su.

Ce conflit est très emblématique des intérêts des puissants et de la situation des faibles dans la géopolitique mondiale d’aujourd’hui. L’ONU -est-ce une surprise ?- est paralysée par l’implication de deux membres du Conseil de sécurité aux côtés des autorités soudanaises : la Russie fournisseur d’armes d’une répression sans nom d’un gouvernement sur une de ses populations -de l’Ouest- et la chine qui exploite le pétrole du pays.


A cette neutralisation de l’ONU, finalement bien faiblement utile à la paix dans le monde, lorsque de surcroît ses « grands pays » ne sont pas d’accord…, précède la vieille tradition de razzias esclavagistes menées par les populations arabes sur les Noirs (*), dans un climat politique dominé par une dictature militaire islamique.


Un conflit complexe donc. Politique, les Africains -non musulmans ou pas assez (*)- ayant toujours été muselés et sujets de brimades et servitudes, s’étant mis en rébellion contre le régime islamique au pouvoir ; économique avec des oppositions pour le partage de la terre entre paysans sédentaires et nomades; et religieux-culturel -«animistes» contre musulmans (*).

Au milieu de cette catastrophe humanitaire où les conditions d’existence des déplacés s’aggravent de jour en jour, en 2004, mai 2004 selon le journal allemand Zeit, la Syrie avait profité du cheptel humain africain, pour tester sur les populations africaines du Darfour, des armes biologiques. En accord de «coopération» avec le gouvernement soudanais ! Une information passée inaperçues en son temps.


Les tribulations de l’Union africaine, de l’UE et toutes les interpellations, appels et mobilisations ne parviennent aucunement à infléchir la violence du régime central du Soudan. Il faut reconnaître que le Darfour représente un bon «produit» dans l’imagerie occidentale inconsciente du monde. Des Noirs jamais moins indignes dans les images internationales retrouvent toute leur place dans les médias occidentaux. Une place utile à montrer un négatif, utile à démontrer indirectement les zones «civilisées» où il vaudrait mieux avoir le privilège de vivre, tout en se rendant sensible aux clichés dégradants et avilissants de peuples entiers pourtant visibles sur d’autres aspects.


Prenant la place jouée naguère par l’Ethiopie et les famines, le Darfour rassure aussi ceux qui n’imaginent l’Afrique que malade, en guerre, mourante, à aider, modalité subtile de contrôle des Etats modernes et riches, tout en inculquant aux Africains la haine de soi, l’indifférence aux autres, aux valeurs, à soi.


Le Darfour rempli ainsi une mission de reproduction des imaginaires de la modernité, de la civilisation et des barbaries, avec l’aide de tous ! »


Les cinq précautions commentées :

— 1) «milices dites "arabes"»
: «dites "arabes"» (avec les guillemets), précision indispensable ;

— 2) «"ethnies" dites "africaines"» : de même que les guillemets à «arabes», les guillemets à «ethnies» et à «africaines» sont fort utiles dans la mesure où tous, localement, sont «africains», et où il n’est pas indispensable de recourir à la notion d’«ethnie» ;

— 3) «les Africains - non musulmans ou pas assez -» : la précision «pas assez» musulmans, corrigeant «non musulmans» donne cette indication fort précieuse : le véritable problème local n’est pas «ethnique», mais relève de l’intégrisme du pouvoir (pouvoir soutenu en son temps, au-delà de la Chine et de la Russie, aussi par la France et les USA ! — ceci expliquant largement cela). Le régime intégriste a ainsi tout loisir de ne pas tolérer, et les chrétiens, et les musulmans… «pas assez» musulmans (que nos médias appellent les «Noirs» pour les distinguer des «Arabes», lesquels «Arabes» sont éventuellement aussi africains, voire «noirs» que les autres ! — mais lesdits «Arabes» sont adeptes d’un islam — arabe — qu’ils considèrent plus pur…

— 4) «"animistes" contre musulmans» : on comprend à la lecture de ce qui précède que les guillemets à «animistes» sont indispensables.


À cela s’ajoute

— 5) «la vieille tradition de razzias esclavagistes menées par les populations arabes sur les Noirs», «tradition»-prétexte sur laquelle s’appuient les intégristes au pouvoir — cette «vieille tradition» servait en effet d’alibi pour des razzias s’autorisant d’une… mission civilisatrice — «les bienfaits de la colonisation» — (musulmane en l’espèce) : réduire des populations en esclavage pour leur bien !

Où les puissances onusiennes, au-delà de leurs intérêts, manifestent un certain… embarras ; tandis que nos médias, sous prétexte de simplifier les choses pour le public (mais ont-ils bien saisi eux-mêmes), ethnicisent un problème autre, et du coup, embrouillent tout.

Pendant ce temps, les musulmans «pas assez» intégristes, non seulement subissent violences et massacres, mais servent en outre d’alibi à la bonne conscience du citoyen euro-américain lambda, qui peut s’en prendre aux «Arabes», finalement bien pires qu’on l’est chez nous : c’est ainsi que nos pouvoirs, se joignant à ce concert larmoyant mais inoffensif — d’un citoyen télévisuel qui ne comprend rien (et pour cause) —, peuvent continuer à s’indigner vertueusement contre les Chinois, les Russes… et accessoirement les Africains, décidément incurables !…

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