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vendredi, 30 mai 2008
Nouveau scoop dans l’affaire Kieffer : Boga Doudou opposant de Gbagbo !
… Opposant « notoire » pour citer précisément David Servenay annonçant sur Rue89 un « scoop » de Canal+.
Car voilà qu’on nous ressert les fameux « escadrons de la mort de Gbabgo » que d’autres journalistes avaient jusque là pris l’habitude d’évoquer avec plus de circonspection…
David Servenay, lui, qui semble ignorer qui était Émile Boga Doudou, semble ne pas savoir non plus que la justice française a condamné ses confrères qui avaient lancé le « scoop » desdits « escadrons » (en tête desquels confrères Stephen Smith du Monde — tout de même). Diffamation, pour laquelle de tels grands noms de la presse française ont dû payer au couple Gabgbo et à leurs gardes du corps des dommages et intérêts. Il y a quelque temps il est vrai : David Servenay a donc dû oublier…
À moins qu’il n’argumente à l’esbrouffe. Il n’avait pas cité Boga Doudou parmi les « opposants notoires » de son article. Il ne le mentionne qu’en commentaire, talonné par des commentateurs (Djignab et Destribat) qui lui demandent de nommer les fameux « opposants notoires » assassinés. Et comme il n’y en a pas, il nous lâche… Boga Doudou, proche de Gbagbo, haut responsable du FPI assassiné alors que la rébellion tente de renverser le gouvernement Gbagbo dont Boga Doudou est ministre de l’Intérieur ! Soit D. Servenay est très (trop) mal renseigné, soit il tente un coup d’esbrouffe (espérant que ses commentateurs soient aussi mal renseignés qu’il semble l’être ?) pour étayer son propos sur les « escadrons de la mort ».
Pour les autres victimes qu’il mentionne, il déclare le comédien télé Camara H « opposant notoire » — sauf que la notoriété de Camara H n’était pas due à son appartenance au RDR mais à son statut d’homme de télé connu !… Du coup, le voilà qui représente à lui tout seul « les artistes » (au pluriel – sic) assassinés… Son cadavre, on s’en souvient, s’est trouvé exhibé sur le terre-plein central d’une voie rapide très fréquentée, et arboré en boucle dans tous nos journaux télévisés — ce qui a alors permis aux médias français d’occulter, ou au moins de lourdement minimiser, les manifestations monstres d’Abidjan contre le coup fourré parisien de Marcoussis.
Voilà un assassinat qui, pour Gbagbo, serait revenu à se tirer une balle dans le pied, comme celui de son ancien ami Dacoury-Tabley (le troisième que mentionne Servenay, en commentaire) ; comme aussi celui du jardiner de Ouattara qui se trouve précisément être le jardinier… de Ouattara — ce qui en fait ipso facto un haut cadre de l’opposition !? pour reprendre l’interrogation de Destribat. On lira avec profit ses commentaires, ainsi que ceux de Djignab. Ils ont manifestement mis dans l’embarras D. Servenay, lequel a utilisé, ainsi que le note Destribat, et apparemment comme seule source sur ce point, un article de Jeune Afrique — du temps où le magazine était une des voix marquantes des attaques françafricaines contre la Côte d’Ivoire.
Mais alors quid de l’autre « scoop » ? — celui de Canal+ sur l’affaire Kieffer… Eh bien là, pas grand-chose, hélas.
Pour l’essentiel, ce qui était déjà de notoriété publique : la Côte d’Ivoire a acheté des armes pour se défendre, et a pour cela utilisé l’argent que lui rapporte le cacao qu’elle produit. Ce qui n’a jamais été ignoré. « Gbagbo est le premier à avoir dit que l'argent du cacao a servi à acheter des armes pour protéger l'État ivoirien. C'était en 2003, donc avant que Monsieur Kieffer ne disparaisse », note Djignab.
Un commentaire de Destribat pose la bonne question : « si la France n'avait pas fui ses responsabilités (application des accords de Défense de 1962), l'argent du cacao aurait servi à financer des projets éducatifs, de santé »... et il n’y aurait pas eu de lieu d’acheter « des armes en Ukraine, des drones et l'assistance militaire israéliens », poursuit Destribat.
C’est là qu’est le mystère de l’affaire Kieffer… Car quel sens cela a-t-il de faire disparaître quelqu’un réputé dévoiler… des faits connus ?
Quant à ce que la justice française se voit opposer des obstacles, ce n’est pas un scoop non plus, comme il n’est plus un scoop que Paris lui oppose des obstacles dans l’enquête sur la mort des soldats français de Bouaké.
Un des obstacles majeurs à l’enquête Kieffer consiste peut-être… à faire mine de bloquer sur la non-extradition de Legré ! Comme si, en inversant les choses, un Français soupçonné par la justice ivoirienne d’avoir participé à un enlèvement en France pouvait être extradé vers la Côte d’Ivoire !!!
Quant aux « témoins » qui sont en France, Jean-Tony Oulaï ou Berté Seydou, leur présence n’a pas fait avancer grand-chose. Ils ont pourtant fait eux aussi l’objet de nombreux « scoops ».
Et pendant qu’on nous ressert ce type de « scoops » sempiternels, l’enquête piétine… En revanche, il semble que les « escadrons de la mort » aient encore de beaux jours médiatiques devant eux…
À preuve, il n’en fallait pas plus pour que Hofnung sorte de son amer silence et nous donne la conclusion de ce qui à ce jour reste une énigme : Legré comme « appât » (certes au conditionnel – restons prudent) et Gbagbo comparé à Le Pen évoquant son « détail » ! Où Hofnung franchit une nouvelle étape : comme le note très bien Djgnab, il fallait « oser mettre en parallèle la négation d’un génocide » avec l’affaire Kieffer. Hofnung a osé ! « Libération ne serait-il pas un peu haineux ? » demande Djignab en titre de son article. Comme le remarque Théo en commentaire : « Contre Gbagbo, contre Chavez, à peine contre Bush... Fort avec les faibles, faible avec les forts ». Attitude qui apparemment satisfait Hofnung, mais qui n’apporte rien concernant Kieffer — même quand il nous assure que « Kieffer multipliait les scoops dans la presse locale sur les malversations présumées des caciques du régime de Laurent Gbagbo » (cf. la réponse de Djignab). (Je n’ai toujours pas trouvé le ou les articles de Kieffer en question. Un commentateur de Servenay, Paul Aymé, promet qu’ « en quelques clics sur internet, vous en trouvez au moins une quinzaine sur différents sites » — « cacao ivoirien, global witness, bitter chocolate de carol off, la lettre du continent » précise-t-il. Les moteurs de recherche ne m’ont pas fourni lesdits articles de Kieffer à ces références-là… Si quelqu’un est plus habile que moi…)
Les questions troublantes sont posées, en commentaire de l’article de Hofnung, par Bernard Kieffer : « Pourquoi l'ambassade de France et les deux représentants du Quai d'Orsay qui étaient sur place ont-ils discrédité Guy-André Kieffer ("c'était un affairiste douteux qui n'a eu que ce qu'il méritait"), sitôt son enlèvement connu ? Pourquoi Le Lidec, ci-devant ambassadeur de France, a-t-il refusé de recevoir GAK qui lui avait demandé audience quelques jours avant son enlèvement ? […] Pourquoi Joubert et Delapalme ont-ils refusé de s'expliquer devant les auteurs du reportage diffusé par Canal Plus ? […] Pourquoi le Quai d'Orsay prétend-il n'avoir aucune information sur cette affaire qui regorge d'informateurs en tout genre ? […] Pourquoi la Brigade criminelle s'est-elle vu interdire de travailler sur ce dossier en novembre 2007, alors qu'elle enquêtait depuis le début de l'affaire ? Pourquoi cette attitude plus qu'ambiguë des autorités françaises ? »
Destribat, qui se présente comme « un simple citoyen qui refuse simplement d'être pris pour un con » rappelle quelques éléments utiles :
« Tout le monde sait que c'est Gbagbo qui a demandé [à GAK] cet audit sur la filière cacao. Si comme semble le montrer l'enquête, les hautes autorités ivoiriennes sont impliquées dans cette affaire, qu'est-ce qui les empêchait dès le départ d'expulser GAK ? Lorsque les autorités ivoiriennes dénonçaient l'impartialité de RFI dans le traité de la crise ivoirienne, ils ont purement et simplement privé d'antenne la radio. […]
Jean Ziegler ventait les louanges de l’Assurance Maladie Universelle que le parti de Laurent Gbagbo a fait adopter au parlement ivoirien début 2002. Le financement de ce programme, une première dans un pays du tiers Monde, a été bouclé en parti en prélevant une taxe sur l’exportation du cacao (Gbagbo parlait de 1 à 2% à l’époque). L’AMU devait garantir à toute personne résidant sur le territoire national de bénéficier des soins gratuits. Ce programme n’a pas hélas pu se mettre en place à cause de cette sale guerre, et l’argent prévu à cet effet a servi à acheter les armes pour résister à une rébellion dont les soutiens extérieurs sont légions.
L’armée ivoirienne ? Elle n’existait que de nom. […] La Côte d’Ivoire a procédé à un réarmement important […].
Les pistes américaines et européennes, plusieurs quotidiens qu’on qualifie de proche du pouvoir l’on souvent mentionné en Côte d’Ivoire. Les Ivoiriens ont la conviction que l’Affaire GAK est devenue aujourd’hui un épouvantail pour faire pression sur Gbagbo à chaque fois que le processus de paix semble aller vers la résolution définitive du conflit. »
17:36 Publié dans Analyses & commentaires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vingtaine, côte d'ivoire, afrique, delugio, politique, actualité, international
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