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« Hollande et le PS sur la Côte d’Ivoire : la dérive des incontinents | Page d'accueil | 437 ! »

dimanche, 06 août 2006

Colonies, dhimmitude, conflit proche-oriental, et politiques arabe et africaine de la France



(Cette première partie est un texte d'emprunt repris avec autorisation
de son auteur, qui a gardé l'anonymat - je lui ai fait avec son accord,
quelques autres emprunts intégrés dans d'autres billets)


Tartarin de Tarascon
,
Alphonse Daudet, 1872 : «{…} le bourriquot algérien a les reins solides... il le faut bien pour supporter tout ce qu'il supporte... demandez plutôt aux arabes. Voici comment ils expliquent notre organisation coloniale... en haut, disent-ils, il y a mouci le gouverneur, avec une grande trique, qui tape sur l’état-major ; l'état-major, pour se venger, tape sur le soldat ; le soldat tape sur le colon, le colon tape sur l'arabe, l'arabe tape sur le nègre, le nègre tape sur le juif, le juif à son tour tape sur le bourriquot ; et le pauvre petit bourriquot n' ayant personne sur qui taper, tend l' échine et porte tout.»

Si l’on passe sur quelques éléments de détail, l’explication globale du système colonial et de son fonctionnement hiérarchique, par Alphonse Daudet, ou plutôt par les Arabes selon lui, est finalement très actuelle. Elle date de 1872, soit deux ans après le décret Crémieux, qui, lorsqu’il sera entré dans les faits, fera remonter «le juif» de deux crans dans cette hiérarchie, puisqu’il passera au-dessus de «l’Arabe». J’y reviens.

En 1872, avant que les conséquences du décret Crémieux de 1870 ne soient intégrées dans les mentalités, le système est relativement simple : il s’agit d’une intégration à la République du système de la dhimmitude. Le système colonial (et sa chute – cf. infra) s’expliquent assez bien dans cette perspective. Vers le bas de la hiérarchie, de «l’Arabe» au bourriquot, on retrouve bien le système du dhimmi. «Le nègre» est au-dessus «du juif» dans la mesure où, en Afrique du Nord, il est musulman ; mais il est au-dessous de «l’Arabe» dans la mesure où l’on n’a pas oublié qu’il n’est pas musulman d’origine, qu’il l’est devenu via sa réduction en esclavage. Il est désormais en principe égal, mais la mémoire a son poids.


Quant au catholique (et autres chrétiens non-catholiques dans une moindre mesure — on sait ce que Daudet pensait des protestants) qui, dans le système musulman de la dhimmitude, serait en principe au niveau du juif, ou peut-être juste au-dessus, il est passé au–dessus de «l’Arabe» par la grâce de la conquête coloniale française. Il est colon, donc dans les «hautes sphères», citoyen de plein droit. C’est ce qui arrivera aussi «au juif» comme effet du décret Crémieux (ce qui explique «qu’il» choisira naturellement la République plutôt que la terre originelle maghrébine).

Où l’on voit que le système colonial correspond à une remarquable adaptation culturelle du système «indigène» (qui vaut de Lille à Brazzaville), et où s’explique le fait que dans le vocabulaire d’alors (et parfois d’aujourd’hui – cf. Sarkozy et son préfet «musulman») «musulman» soit donné en pendant d’Européen. On s’étonne en vain de ce qu’une religion soit donnée en vis-à-vis d’une origine géographique. L’étonnement ne vaut que si l’on n’a pas compris l’intégration de la dhimmitude aux colonies : une hiérarchie s’est substituée à une autre en intégrant une autre (d’où aussi le succès d’un mot à double sens : le mot intégration).

Où s’explique la chute de l’Empire colonial : qui supporte indéfiniment d’être «protégé» mais non-égal — la dhimmitude ? À ce point, la non-hésitation des juifs entre République et dhimmitude est naturellement éloquente. C’est cette «protection», comme non-citoyens, que les Arabes et les Noirs ont rejetée en revendiquant l’indépendance : une sorte de «dhimmitude» républicaine, une non-citoyenneté indéfiniment prolongée.

Où s’annonce que la question du concept de dhimmitude est ce que devra tôt ou tard régler l’islam ou il y trouvera sa chute, comme l’Empire français y a trouvé la sienne : nul ne supporte indéfiniment de n’être qu’un «protégé» — cf. le choix des juifs des pays arabes (de la République à Israël — Israël qui ferait bien à son tour de prendre garde à la tentation de rejouer à sa façon la hiérarchie de la dhimmitude façon colonies ! C'est la mise en garde d'un Yeshayahou Leibovitz). (Gageons en outre que les États-Unis s’en prenant à l’arabisme laïque — Irak et Syrie — plutôt qu’aux islamismes, ont peut-être compris cela : le système de la dhimmitude est la faille, le talon d’Achille du monde musulman. Autant, donc, le laisser prospérer, ne doutant pas que l’ennemi en mourra.)

La France en est restée ailleurs, en est restée avant, à la nostalgie, non sans mauvaise conscience, de l’Empire — hiérarchique — et de ses «aspects positifs».

Où s’explique une certaine tournure d’esprit dont on pourrait s’étonner, si on n’en connaissait, par des reliquats façon Alphonse Daudet, les racines : celle qui nous vaut la politique arabe et africaine de la France, avec entre autres saillies remarquables, celle d’un Douste-Blazy sur l’effet «stabilisateur» de l’Iran des mollahs et de leur volonté d’éradication des juifs au Moyen-Orient. On est au cœur d’une logique qu’on n’a jamais quittée, la logique coloniale et son sens hiérarchique intégrationniste.

C’est cette même logique, qui nous vaut aujourd’hui la sortie de Douste-Blazy, qu’a comprise hier la rébellion de Côte d’Ivoire et ses représentants bon chic bon genre qui pour emporter l’opinion et l’appui militaire français n’ont eu qu’à faire valoir via les médias parisiens (dès 1999) qu’on y ostraciserait les musulmans : où le souvenir enfoui de la hiérarchie décrite par Alphonse Daudet fera son office pavlovien, comme une des racines de l’imbroglio dans lequel on s’est fourré et qui nous discrédite dans toute l’Afrique — tout comme il est une des racines de notre politique proche-orientale, dont nul ne voit le sens et qui finit par irriter et les juifs… et les musulmans, notamment ceux d’entre les religieux qui prennent la mouche (forcément) dès qu’ils pressentent — façon de quiproquo — qu’on ne se place pas de nous-même en bas dans la hiérarchie de la dhimmitude.

Bref, on n’a pas pris la leçon de la chute de l’Empire — qui serait d’entendre enfin concrètement l’article 1er de la Déclaration des Droits de Homme et du Citoyen : «tous les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits.»

Si l’on entendait cela, on saurait qu’il n’est question de tolérer ni hiérarchie essentialiste, ni quelque dhimmitude que ce soit, fût-elle coloniale, post-coloniale, ou autre…




medium_mine_verte.2.JPGAu secours !


Censure sur blogs.nouvelobs.com : Titre de ma chronique d’hier (censurée) : «Hollande et le PS sur la Côte d’Ivoire : la dérive des incontinents»
Contenu : «Après le lâchage peu glorieux des socialistes ivoiriens et de la Côte d’Ivoire républicaine par le PS français, Hollande tente de "s’expliquer" sur Jeune Afrique. Laborieux…
La suite sur : http://unevingtaine.hautetfort.com/ ou sur : http://delugio.zeblog.com/».

Et c’est cette seule annonce qui est censurée ! Cela vaut-il censure ? Apparemment oui, en tout cas au gré d’un journal «de gauche» et voulu «libéral» (à l’ancien sens du terme)… Le lecteur jugera...

Compte tenu du taux de la censure de mon blog [sur blogs.nouvelobs.com] (env. 20% d’articles au bas mot), j’ai dû émigrer ailleurs (sur les serveurs de blogs indiqués ci-dessus [hautetfort et zeblog])…

Titre de ce jour (que je n’ai pas osé mettre sur [blogs.nouvelobs.com]) : «Colonies, dhimmitude, conflit proche-oriental, et politiques arabe et africaine de la France». Intro : «Tartarin de Tarascon…» — le lecteur éventuel y trouvera peut-être matière à réflexion sur la censure (ou l’auto-censure ?) des journaux français sur nos ex-colonies : on n’a manifestement pas la possibilité de dire grand-chose !



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