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vendredi, 12 octobre 2007

"Françafrique, Accords de Défense et spoliations"



Afrikara —
07/10/2007 —

http://www.afrikara.com/index.php?page=contenu&art=19...

par Akam Akamayong :

« Au début des années 60 suivant les sociétés africaines, la littérature politique s’empare avec enthousiasme du thème des indépendances. Elle valide souvent rapidement la décolonisation formelle, pour le bonheur de ceux qui espèrent dans un grand soir de liberté universelle et pour ceux qui, au contraire se délectent d’un tour de passe-passe permettant de frauder avec les apparences de libération. Toujours est-il qu’aucun pays occidental, aucune communauté européenne installée en Afrique ne renoncera à ses privilèges sans tenter et souvent parvenir dans le secret, à restaurer ses rentes. C’est ce qu’a parfaitement réussi la France coloniale, qui a perpétré un mensonge d’Etat à son peuple, en feintant un retrait définitif et historique d’Afrique, malgré les bases militaires encore toujours présentes, les firmes multinationales de Bouygues à Bolloré qui continuent, bien au-delà de leurs missions officielles, de servir les intérêts bien compris du pré carré, de la Francafrique. La Francafrique, cette partie rhizomique et criminelle des intérêts de quelques groupes français en Afrique, prêts aux pires actions et exactions, allant de la guerre du Biafra à celle du Congo-Brazzaville, aux opérations Turquoise ou Epervier, visant à maintenir tous les bénéfices possibles de prédations et de spoliation en collusion avec des classes dirigeantes clientes.

Alors qu’une course nouvelle aux matières premières ébranle le sous-sol africain et paupérise l’essentiel du continent, au Niger, au Mali, en Côte d’Ivoire, en Guinée, au Gabon, au Congo, au Cameroun, en Guinée équatoriale, … il est important de saisir un des maillons par lesquels les apparences d’indépendances ont été contournées par les groupes prédateurs.
Dans les années 2000, le pic pétrolier annoncé, l’entrée dans l’après-hydrocarbures accélérant les positionnements des pays et firmes pour se prémunir de ruptures d’approvisionnements ultérieurs, ou pour préempter le sous-sol africain afin d’éliminer des concurrents industriels émergents -Chine, Inde, Brésil, ….-, des configurations nouvelles apparaissent. Quant aux élites africaines, pour l’heure, elles investissent à corps perdu pour «vendre» leurs pays en espérant amasser suffisamment de fortunes pour elles-mêmes. Les exemples des prédécesseurs ne leur auront pas servi, le compte en banque ambulant Mobutu Sese Seko s’en étant allé enterré en catimini, honteusement dans un cercueil d’à peine quelques kilogrammes pour un corps rongé par le cancer… Les jeunesses francafricaines, répandues en Afrique et en diaspora, nonobstant les salaires ultimes et peu enviables des Bokassa, Mobutu, Kabila, Ahidjo, Senghor, … se lèchent également bêtement les babines, jouant la montre et spéculant sur la fin du cycle naturel des présidents à vie. Elles aussi croient dans l’infinité des fortunes du bradage de l’Afrique aux Blancs. Un chemin mille fois piégé, mais l’imbécillité prédatrice blindée de gris-gris et avide autant que vide d’idéal, n’est que difficilement amendable, engluée dans le clin clan, les petites choses et les basses manœuvres.

Il reste aux alternatives naissantes une indispensable compréhension des mécanismes de prédation, de dépossession des Africains, de leur paupérisation légale. Les pseudo «Accords» de Défense imposés par la Francafrique aux anciennes colonies qu’elle tenait par un exécutif façonné à ses besoins et une économie de traite qu’elle dominait, illustrent une technique de dépossession qui n’est qu’une modalité du pillage du continent. «Signés» en principe en 1961 simultanément et en lot par quatre pays -France, Côte d’Ivoire, Dahomey (Bénin), Niger- évoquant une administration centralisée du pré carré «indépendant», les dispositions en annexe II desdits accords établissent un contrôle de la France sur les politiques d’exportations et d’importations de matières premières des anciennes colonies.
En laissant supposer une réciprocité de contrôle des politiques inaccessibles aux Africains, ne serait-ce que faute de moyens, ils ne peuvent pas et ne se sont pas donnés tous les arguments techniques quarante ans plus tard pour établir la réalité des «exportations» prédatrices de pétrole, d’uranium, d’or, etc., la Francafrique signe un forfait habillé par le droit international.
A partir de ces dispositions, et d’autres secrètes renforcées par les usages et pratiques de corruptions croisées des Africains et des Européens (Cf. Affaire Elf), l’uranium, le pétrole, l’or, le phosphate, … seront vite entre les mains d’intérêts francafricains au détriment des besoins des peuples affamés.

La présidence ivoirienne a rendu publique certaines dispositions de ces «Accords de Défense» dont nous reprenons l’annexe II qui nous concerne. Deux articles, 3 et 4 consacrés aux obligations africaines d’information de la France sur leurs politiques de matières premières sont identiques (?) ainsi que l’on pouvait l’observer sur le site Internet de la présidence ivoirienne.



Accords de défense entre la Côte d'Ivoire et la France
 
Annexe II
 
A l’accord de Défense entre la République de Côte d’Ivoire, la République du Dahomey, la République Française et la République du Niger concernant la coopération dans le domaine des matières premières et produits stratégiques.
Afin de garantir leurs intérêts mutuels en matière de Défense, les parties contractantes décident de coopérer dans le domaine des matériaux de Défense dans les conditions définies ci-après :
 
Article 1 : Les matières premières et produits classés stratégiques comprennent :
- Première catégorie : les hydrocarbures liquides ou gazeux ;
- Deuxième catégorie : l’uranium, le thorium, le lithium, le béryllium, leurs minerais et composés.
Cette liste pourra être modifiée d’un commun accord, compte tenu des circonstances.

Article 2 : La République Française informe régulièrement la République de Côte d’Ivoire, la République du Dahomey et la République du Niger de la politique qu’elle est appelée à suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques, compte tenu des besoins généraux de la Défense, de l’évolution des ressources et la situation du marché mondial.

 
Article 3 : La République de Côte d’Ivoire, la République du Dahomey et la République du Niger informent la République Française de la politique qu’elles sont appelées à suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques et des mesures qu’elles se proposent de prendre pour l’exécution de cette politique.

Article 4 : La République de Côte d’Ivoire, la République du Dahomey et la République du Niger informent la République Française de la politique qu’elles sont appelées à suivre en ce qui concerne les matières premières et produits stratégiques et des mesures qu’elles se proposent de prendre pour l’exécution de cette politique.


Article 5 : La République Française est tenue informée des programmes et projets concernant l’exportation hors du territoire de la République de Côte d’Ivoire, de la République du Dahomey et de la République du Niger des matières premières et des produits stratégiques de deuxième catégorie énumérés à l’article premier.
En ce qui concerne ces mêmes matières et produits, la République de Côte d’Ivoire, la République du Dahomey et de la République du Niger, pour les besoins de la Défense, réservent par priorité leur vente à la République Française après satisfaction des besoins de leur consommation intérieure, et s’approvisionnent par priorité auprès d’elle.

 
Article 6 : Les Gouvernements procèdent, sur les problèmes qui font l’objet de la présente annexe, à toutes consultations nécessaires.
 
Fait à Paris, le 24 avril 1961
Pour le Gouvernement de la République de Côte d’Ivoire : Félix Houphouet-Boigny, Pour le Gouverneur de la République Française: Michel Debré, Pour le Gouverneur de la République du Dahomey :Hubert Maga, Pour le Gouverneur de la République du Niger: Hamani Diori.
 
 
Commentaire.

Le premier article définit l’objet, les matières premières et produits concernés par les «accords». Le deuxième donne les obligations de la France, les troisième et quatrième, identiques (erreur de reproduction ?) fixe les obligations africaines, et le cinquième et dernier, crucial, définit le privilège de la France sur la jouissance des matières premières africaines.
Une chose saute aux yeux. Les obligations françaises et africaines ne sont pas libellées de la même façon, et de fait, ne sont pas les mêmes. Les Africains informent la France sur les politiques qu’ils mènent sur leurs matières premières et les moyens ou mesures de l’exécution de ces politiques. La France n’est tenue à cette obligation que «régulièrement» c'est-à-dire pas systématiquement, premier biais. Deuxième biais la France informe régulièrement sur la politique -terme généraliste- qu’elle est appelée à suivre, mais pas sur les mesures -terme concret- qu’elle se propose de prendre, à la différence des Africains. Enfin en rajoutant l’expression «compte tenu des besoins généraux de la Défense, de l’évolution des ressources et de la situation du marché mondial», une confusion volontaire est insinuée. Sémantique puisqu’il n’est pas évident que le «compte tenu» s’applique à «la République française informe…» ou alors à «la politique qu’elle est appelée à suivre …», ce qui pourrait vouloir dire que la France informe compte tenu de la Défense etc., donc qu’à la limite elle pourrait légalement ne pas informer.

Le droit et ses apparences, outil moderne de non-droit et de prédation, l’exemple francafricain des «Accords de défense» est probant. »





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